Le cloud tempère la passion pour Microsoft et l'IA
Souvent considéré comme le leader de la course à l'intelligence artificielle (IA) générative, Microsoft voit désormais ses résultats financiers évalués à l'aune des revenus liés à cette technologie de pointe, par rapport aux investissements astronomiques qu'elle nécessite.
Le géant de l'informatique a ainsi déçu mardi, à cause des performances moins bonnes que ce qui était espéré pour son activité de cloud (informatique à distance) et de services d'IA.
Azure, sa plateforme de cloud qui héberge les nouveaux outils d'IA générative, a vu ses ventes progresser de 29%, au lieu des 31% escomptés par le marché pour la période d'avril à juin.
La sanction a été immédiate à Wall Street: son titre a perdu jusqu'à 7% lors des échanges électroniques après la clôture de la Bourse.
Le groupe de Redmond joue sur tous les tableaux de l'IA: il a injecté des milliards de dollars dans OpenAI, la start-up qui a mis au point ChatGPT, il est le numéro deux du cloud mondial (derrière Amazon, devant Google) et développe ses propres services et appareils adaptés à cette nouvelle technologie.
"Nous avons aujourd'hui plus de 60.000 clients pour Azure AI, soit 60% de plus qu'il y a un an, et le niveau de dépenses moyen par client continue de croître", a indiqué Satya Nadella, patron de Microsoft, lors de la conférence aux analystes.
De quoi rassurer le marché: l'action du groupe ne perdait plus que 3% dans la foulée.
- "Baromètre" -
En tout, le groupe de Windows a réalisé 64,7 milliards de dollars de chiffre d'affaires au quatrième trimestre de son exercice décalé, en hausse de 15% sur un an, dont il a dégagé 22 milliards (+10%).
"Microsoft et Nvidia sont les deux meilleurs baromètres technologiques du rythme d'adoption de la révolution de l'IA à l'échelle mondiale", souligne Dan Ives, de Wedbush.
Avec ses puces ultra sophistiquées, Nvidia est l'autre groupe qui profite largement de l'engouement pour l'IA générative et ses modèles (comme ChatGPT), capables de produire des contenus de bonne facture, sur simple requête en langage courant.
L'analyste ne s'inquiète pas des réactions "impulsives" de Wall Street et tire les enseignements suivants de la conférence: "l'IA va bien générer des revenus et les investissements dans l'IA constituent une nouvelle infrastructure informatique pour les 15 prochaines années".
Il table sur 25 milliards de dollars de revenus supplémentaires liés à l'IA pour Microsoft d'ici l'année fiscale 2025.
Mais pour l'instant, la technologie star de la Silicon Valley représente avant tout des dépenses massives dans les centres de données, l'énergie, les composants électroniques et les ressources humaines.
Microsoft a annoncé plus de 15 milliards de dollars d'investissements dans l'IA à l'étranger cette année, de la France à l'Indonésie.
- "PC à l'IA" -
Amy Hood, la directrice financière de Microsoft, a de nouveau reconnu mardi que les dépenses allaient encore augmenter, mais assuré que les nouvelles infrastructures étaient "incroyablement flexibles" et allaient rapporter de l'argent "pendant 15 ans et au-delà".
Elle a aussi précisé que le groupe continuait de faire face à une demande plus élevée que ses capacités actuelles.
L'activité d'ordinateurs personnels de Microsoft a de son côté rapporté près de 16 milliards de dollars de revenus trimestriels, en hausse de 14% sur un an, portée notamment par les ventes liées au système d'exploitation Windows et à la Xbox.
Ses ventes d'appareils ont en revanche baissé de 11%, après une année 2023 déjà difficile.
Le groupe compte sur ses "PC à l'IA" pour remonter la pente. Présentés en mai, il s'agit d'ordinateurs dans lesquels des outils d'IA générative sont intégrés directement au système d'exploitation Windows, pour assister l'utilisateur dans ses tâches.
Les livraisons mondiales de PC et smartphones à l'IA générative devraient atteindre près de 300 millions d'unités d'ici la fin de l'année, contre 29 millions en 2023, selon le cabinet d'études Gartner.
Mais la réputation de Microsoft a été un peu ternie ces derniers mois par des incidents de cybersécurité et la panne mondiale de mi-juillet, quand la mise à jour d'un logiciel de CrowdStrike sur Windows a paralysé des aéroports, des hôpitaux et de nombreuses autres organisations.
"Cela pourrait affecter ses divers contrats avec le gouvernement et la défense, et ralentir l'adoption par les entreprises clientes prudentes", commente Gadjo Sevilla, analyste d'Emarketer.
(V.Varonivska--DTZ)