Ultimes et difficiles négociations à la COP, en route vers les prolongations
La COP27, qui bute sur le financement des dégâts déjà subis par les pays pauvres, risque de jouer les prolongations au-delà de vendredi, son dernier jour prévu, malgré l'appel du patron de l'ONU à trouver un accord "ambitieux".
L'année 2022 a illustré la multiplication des catastrophes liées au changement climatique - inondations, sécheresses affectant les récoltes ou méga-feux.
Et la conférence annuelle de l'ONU sur le climat à Charm el-Cheikh, en Egypte, vise à relever les engagements des quelque 200 pays participants pour limiter ce fléau.
Mais face à ces catastrophes, les pays du Sud, très exposés aux impacts mais souvent peu responsables des émissions de gaz à effet des serre qui causent le réchauffement, réclament un accord de principe dès la COP27 sur la création d'un fonds dédié consacré à ces "pertes et dommages".
Ceux du Nord, très réticents, avaient finalement accepté que les dégâts climatiques figurent officiellement à l'agenda de la COP27. Mais insistaient sur une période supplémentaire de discussions avant toute décision.
L'Union Européenne a finalement fait une ouverture tard jeudi, proposant en séance plénière "d'établir un fonds de réponse aux pertes et dommages". Tout en insistant pour que la COP27 prenne aussi des engagements forts sur la réduction des émissions.
Ce fonds devrait être financé par "une large base de donateurs", a insisté le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans. Un mot-clé pour désigner les pays aux moyens financiers conséquents, parmi lesquels donc la Chine, alliée des pays en développement sur ce dossier.
Ce fonds ne serait en outre qu'un élément d'une "mosaïque" de financements à élaborer. Et seuls les pays "très vulnérables" pourraient en bénéficier.
Le représentant du Pakistan, Nabil Munir, qui assure la présidence du puissant groupe de négociation G77+Chine (plus de 130 pays en développement), a qualifié l'offre européenne de "nouvelle positive". Il a toutefois estimé que "beaucoup de divergences demeurent".
- Montrer du doigt -
"Retarder la justice climatique serait un déni de justice", avait insisté plus tôt jeudi la ministre pakistanaise du Changement climatique, Sherry Rehman. "Nous voulons au strict minimum une déclaration politique d'intention".
Un projet de résolution comportant différentes options, dont une assez similaire à la proposition européenne, a été publié tard jeudi pour discussions.
Rentré jeudi après-midi du sommet du G20 à Bali, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, avait appelé les parties à dépasser leurs clivages et cesser de "se montrer du doigt".
Toutes ces discussions financières se déroulent en effet dans un contexte de grande méfiance, les pays riches n'ayant jamais tenu un engagement de 2009 de porter à 100 milliards de dollars par an les financements à destination des pays en développement pour l'adaptation au dérèglement climatique et la réduction des émissions.
- Horloge climatique -
"La manière la plus efficace de reconstruire la confiance est de trouver un accord ambitieux et crédible sur les pertes et préjudices et le soutien financier aux pays en développement", a insisté M. Guterres.
Les négociations patinent aussi sur d'autres sujets importants, notamment la réduction accrue des émissions responsables du réchauffement.
De nouveaux projets de textes de résolutions devaient être publiés dans la nuit ou vendredi matin et les négociations pourraient se prolonger au delà de la fin prévue de la COP, vendredi en fin d'après-midi.
Le sort réservé à la mention des énergies fossiles, à la réduction des émissions et à la réaffirmation des objectifs de l'accord de Paris sera scruté.
Pierre angulaire de la lutte contre le changement climatique, cet accord de 2015 vise à limiter le réchauffement de la planète "nettement en dessous de 2°C" par rapport à l'ère pré-industrielle, et si possible à 1,5°C.
Mais les engagements actuels des différents pays sont loin de permettre de tenir cet objectif. Selon les analyses de l'ONU, ils permettent au mieux de limiter le réchauffement à 2,4°C d'ici à la fin du siècle.
"L'horloge climatique tourne" a martelé M. Guterres à l'orée du dernier marathon de négociations, très politiques.
(V.Sørensen--DTZ)