Géorgie: Kavelachvili, ex-footballeur et président d'extrême droite contesté
Investi président de la Géorgie dimanche en pleine crise politique, l'ex-footballeur Mikheïl Kavelachvili est connu pour ses diatribes contre l'Occident et les détracteurs du pouvoir, qu'il soutient indéfectiblement.
Âgé de 53 ans, M. Kavelachvili a été désigné président le 14 décembre par un collège électoral contrôlé par le parti au pouvoir, le Rêve géorgien.
Son investiture s'est tenue, pour la première fois dans l'Histoire de la Géorgie, à huis clos au Parlement, par crainte des protestations de l'opposition pro-européenne.
Lors de cette cérémonie, cet ancien sportif professionnel devenu homme politique a prôné "l'unité" et "la paix", en insistant également sur "l'amour de la famille et de la patrie" et sur la foi orthodoxe du pays.
"Aujourd'hui, notre pays est confronté à une polarisation artificielle de la société, imposée de l'extérieur", a-t-il dénoncé, promettant de "consolider et d'unir la société".
Ce discours tranche avec les prises de paroles souvent pleines d'obscénités qu'il prononçait jadis devant le Parlement, visant les critiques du Rêve géorgien ou encore les personnes LGBT+.
Avant de rejoindre cette formation politique, il avait été footballeur dans des clubs géorgiens et européens, notamment en Angleterre à Manchester City.
En Géorgie, les pouvoirs du président sont limités et essentiellement symboliques mais l'occupante actuelle du poste, la pro-occidentale Salomé Zourabichvili, a annoncé son refus de rendre son mandat, jugeant la nomination de M. Kavelachvili illégale.
- Loyal au pouvoir -
Les manifestants pro-européens qui protestent quotidiennement depuis deux mois accusent l'ancien footballeur d'être un pantin du milliardaire Bidzina Ivanichvili, qui a fait fortune en Russie, fondé le parti Rêve géorgien et dirige la Géorgie en coulisses depuis 2012.
Selon M. Ivanichvili, son poulain Mikheïl Kavelachvili est "l'incarnation de l'homme géorgien".
Portant la moustache, les cheveux gominés et peignés en arrière, ce dernier est connu pour ses phrases au vitriol.
Ses positions politiques s'alignent sur les idéologies d'extrême droite, notamment sur l'identité nationale, l'opposition à la reconnaissance des droits des personnes LGBT+ et la promotion de la "pureté des valeurs traditionnelles des Géorgiens" face à ce qu'il décrit comme un "fascisme libéral putride" imposé par l'Occident.
Il a attaqué en particulier les personnes LGBT+, victimes d'une hostilité forte dans ce pays où l'influence du christianisme orthodoxe reste prégnante.
Mikheïl Kavelachvili a notamment accusé les Occidentaux de vouloir qu'"un maximum de personnes soient neutres et tolérantes envers l'idéologie LGBT qui défend supposément les faibles mais qui s'oppose en fait à l'Humanité".
- "Illégitime" -
Né dans la petite ville de Bolnisi, dans le sud-ouest du pays, en 1971, il a entamé sa carrière sportive dans les années 1980, en Géorgie et en Russie. Evoluant au poste d'attaquant, il a joué à Manchester City pendant la saison 1995-1996, puis principalement en Suisse.
A partir de 2016, Mikheïl Kavelachvili est député au Parlement, où il a été réélu aux dernières législatives. En 2022, il avait créé une faction anti-occidentale qui s'est officiellement séparée de Rêve géorgien, tout en étant considérée comme restant sous sa coupe.
Dans ses discours, il a accusé les Occidentaux de vouloir pousser la Géorgie -- qui a déjà connu une courte guerre avec la Russie en 2008 -- dans le conflit armé en Ukraine.
Sa nomination en tant que candidat à la présidence avait exaspéré les manifestants pro-UE. "Je peux difficilement imaginer quelqu'un de moins approprié pour ce rôle", indiquait plus tôt en décembre à l'AFP Nika Gobronidzé.
Selon cet historien de 53 ans, le milliardaire Ivanichvili veut un président sous son contrôle: "l'empereur romain Caligula voulait un cheval comme consul, notre oligarque veut sa marionnette Kavelachvili comme président".
Sa légitimité en tant que chef de l'Etat est aussi critiquée par des experts en droit constitutionnel.
Après avoir prêté serment dimanche, il a résumé sa pensée en prônant "le respect des traditions, des valeurs, de l'identité nationale, du caractère sacré de la famille et de la foi" géorgiennes.
(V.Sørensen--DTZ)