Avec Trump, le retour de "l'Amérique d'abord"
Avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, le monde s'apprête à vivre de nouvelles turbulences: isolationniste et imprévisible, le président élu entend bien tourner la page Joe Biden, qui a tenté ces quatre dernières années de restaurer l'image des Etats-Unis dans le monde.
La victoire mercredi du républicain sur la vice-présidente démocrate Kamala Harris aura probablement les répercussions les plus immédiates en Ukraine, où Donald Trump a promis de mettre rapidement fin à la guerre en forçant Kiev à faire des concessions aux envahisseurs russes.
Le magnat de 78 ans estime que "cette guerre n'aurait jamais dû avoir lieu" et il loue sa "très bonne relation" avec le président russe Vladimir Poutine qu'il cherchera sans doute à rencontrer en tête-à-tête, une fois entré en fonctions le 20 janvier.
"Je pense que son premier pas serait une sorte de diplomatie très personnelle, spectaculaire, du genre: +Vladimir, parlons. Nous pourrions résoudre ce problème+", estime Leon Aron, de l'American Enterprise Institute, un centre de recherches à Washington.
"Jusqu'où cela irait-il ? C'est difficile à prévoir", ajoute-t-il cependant, jugeant peu probable que M. Poutine cède sur l'Ukraine et que M. Trump devra aussi tenir compte du Congrès américain qui a son mot à dire sur la politique étrangère.
- Tensions avec les alliés -
Alors que le président sortant Joe Biden avait fait une priorité du renforcement des alliances de la première puissance mondiale, les relations des Etats-Unis avec des alliés historiques pourraient, à nouveau, connaître des tensions.
Donald Trump accuse notamment les Européens d'abuser du parapluie américain et a remis en question l'Otan, pierre angulaire de la politique étrangère des Etats-Unis depuis la guerre froide.
Après l'annonce de la victoire du septuagénaire, de nombreux dirigeants étrangers, d'Emmanuel Macron au Premier ministre britannique Keir Starmer, l'ont félicité.
Elle devrait aussi être bien accueillie par des dirigeants nationalistes comme le Premier ministre hongrois Viktor Orban, que Donald Trump a rencontré à plusieurs reprises durant la campagne, ainsi que par des autocrates, comme le leader nord-coréen Kim Jong Un.
Le Kremlin, pour sa part, a indiqué que Vladimir Poutine n'avait pas prévu de le féliciter.
Quant aux relations avec la Chine, Donald Trump s'est déchaîné contre Pékin, lui qui voit le géant asiatique comme un ennemi.
Toutefois, il a également mis en avant ses relations étroites avec le président chinois Xi Jinping, et se fait fort d'une approche "transactionnelle" des relations internationales.
La Chine a dit espérer une "coexistence pacifique" avec les Etats-Unis après la victoire du républicain.
Le président élu pourrait aussi faire des éclats en Amérique latine, où d'importants partenaires des Etats-Unis, le Brésil et la Colombie, sont désormais dirigés par des présidents de gauche.
L'une de ses principales promesses de campagne - l'expulsion massive de millions d'immigrés sans papiers - risque ainsi de semer le chaos dans la région si elle était mise en œuvre.
A contrario d'une vision multilatérale du monde, Donald Trump défend "l'Amérique d'abord", en particulier dans le domaine du commerce.
- Un "Trump 2.0 différent" -
Pour Brian Finucane, spécialiste de la politique étrangère des Etats-Unis à l'International Crisis Group, il risque de se sentir pousser des ailes par rapport à son premier mandat.
"Un Trump 2.0 serait très différent. Il n'aurait aucune de ces personnalités qui ont, en fait, freiné Trump à un moment donné ou d'une certaine manière, y compris au Pentagone", dit-il.
Le républicain a déjà suscité des craintes à Taïwan en s'interrogeant publiquement sur l'opportunité de défendre l'île en cas d'invasion chinoise.
Au Moyen-Orient, Donald Trump devrait réaffirmer son soutien inconditionnel à Israël, avec en arrière-plan tout faire pour contrer l'ennemi commun iranien.
Il aurait donné, selon des informations de presse, au Premier ministre Benjamin Netanyahu carte blanche dans la guerre dans la bande de Gaza et au Liban, dans les deux mois précédant sa prise de fonctions.
M. Netanyahu a salué "le plus grand retour de l'Histoire", voyant dans le retour de M. Trump à la Maison Blanche "un réengagement puissant dans la grande alliance" avec Israël.
Et le républicain augmentera la pression sur Téhéran, lui qui avait encouragé Benjamin Netanyahu à bombarder les installations nucléaires iraniennes après l'attaque aux missiles contre Israël début octobre.
Durant son premier mandat, M. Trump avait satisfait au transfert de l'ambassade des Etats-Unis de Tel-Aviv à Jérusalem. Il a reçu récemment M. Netanyahu dans sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride.
L'ancien président devrait encore encourager d'autres pays arabes à reconnaître Israël, après les accords d'Abraham en 2020, qui ont vu les Emirats arabes unis, le Maroc et Bahreïn normaliser leurs relations avec l'Etat hébreu.
Et il caressera l'espoir, déçu sous l'administration Biden, d'une normalisation entre l'Arabie saoudite et Israël, ce qui représenterait un bouleversement majeur dans la région.
(W.Novokshonov--DTZ)