France: un effet JO sur la croissance attendu au troisième trimestre
L'effet JO devrait avoir dopé la croissance du troisième trimestre, dont l'Insee donnera la première estimation mercredi, mais la fin d'année, voire le début 2025, devraient être bien plus moroses, selon les économistes.
L'Insee et la Banque de France s'attendent à une croissance ayant atteint 0,4% cet été par rapport au printemps, pour un total annuel, selon l'Institut national de la Statistique, de 1,1%.
Un troisième trimestre pimpant en apparence, donc - après +0,3% et +0,2% aux deux premiers trimestres - mais surtout nourri, selon ces économistes, par l'effet des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) sur l'économie, à hauteur d'environ 0,2 point.
Quelle a été la composition des deux autres 0,2 point? "La grande interrogation" observe Charlotte de Montpellier, économiste chez ING, "c'est la consommation des ménages", qui représente plus de la moitié du produit intérieur brut (PIB).
Elle pourrait avoir été relancée par la forte baisse de l'inflation depuis ses sommets de 2022-2023: elle est tombée à 1,1% en septembre sur un an, en dessous des 2% fixés comme cible par la Banque centrale européenne (BCE).
Une reprise des achats immobiliers ne devrait pas encore se lire dans les chiffres estivaux, la BCE n'ayant commencé à abaisser ses taux d'intérêt qu'en juin.
Quand à l'investissement des entreprises, il est "en souffrance", selon l'Insee, en raison notamment de "l'incertitude politique" de l'été, qui a paralysé les décisions de nombreux patrons, avant l'arrivée du gouvernement Barnier en septembre.
L'effet JOP dissipé, la croissance ralentira mécaniquement au quatrième trimestre. Elle sera même nulle, estime l'Insee. Charlotte de Montpellier anticipe pour sa part un recul de 0,1% du PIB, avant un premier trimestre 2025 en hausse de 0,1% ou moins.
Une récession se caractérisant par deux trimestres consécutifs de baisse du PIB, Mme de Montpellier ne l'exclut donc pas au tournant de l'année. Le président du Medef Patrick Martin a lui-même émis la semaine dernière "le pronostic qu'on est déjà légèrement en récession".
- Le 4e trimestre commence mal -
D'autant que les enquêtes de confiance montrent un mauvais début du quatrième trimestre.
Le climat des affaires s'est replié en octobre à cause "d'une baisse importante du climat dans l'industrie", a observé l'Insee jeudi.
L'activité du secteur privé est tombée à son plus bas niveau depuis neuf mois, selon l'indice PMI Flash publié, jeudi aussi, par l'agence S&P Global et la Hamburg Commercial Bank (HCOB). Quant au moral économique des ménages, il s'est replié en octobre pour la première fois depuis avril, selon l'Insee.
Tariq Kamal Chaudhry, économiste à la HCOB, envisage pour sa part "une croissance modeste" du PIB français au quatrième trimestre.
"La question géopolitique va rester en avant-plan ces prochains mois", pronostique Charlotte de Montpellier, avec un probable "regain de craintes" en cas de victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine.
Pour elle, un "rebond" n'arrivera pas avant la seconde moitié de 2025. L'économiste attend une croissance de 0,7% ou 0,6% au total l'an prochain. Le gouvernement mise sur 1,1%, comme pour cette année, prévision que Patrick Martin juge lui aussi "probablement très optimiste".
"Notre prévision est cohérente et crédible, en ligne avec notre scénario budgétaire", a de son côté assuré dans un entretien à l'AFP vendredi le ministre de l'Economie et des Finances Antoine Armand. Il compte particulièrement sur "la désépargne" des ménages pour relancer la consommation.
Reste que "les pressions se font de plus en plus fortes" pour que le gouvernement adopte "urgemment" des mesures pour remédier aux déséquilibres budgétaires", observe M. Chaudhry.
Alors que le budget 2025 prévoit 60 milliards d'efforts budgétaires, mais que la discussion parlementaire à l'Assemblée nationale est pour l'instant chaotique, les agences de notation ont l’œil vissé sur la France: Fitch et Moody's viennent de la placer sous "perspective négative", indiquant une possible prochaine dégradation de sa note, avec le risque d'une hausse supplémentaire du coût de la dette, si la situation ne s'améliore pas.
(V.Korablyov--DTZ)