Au lendemain de sa nomination, Bayrou entame ses consultations à Matignon
François Bayrou a entamé samedi ses consultations en vue de constituer un gouvernement avec les présidents du Parlement et des personnalités du monde économique, l'agence de notation Moody's ne lui ayant laissé aucun répit en dégradant la note de la France dans la foulée de sa nomination.
Le nouveau Premier ministre a reçu successivement samedi matin le premier président de la Cour des Comptes, Pierre Moscovici, puis la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet.
Son homologue du Sénat Gérard Larcher devrait se présenter à 18H00, a indiqué Matignon au lendemain de la nomination du président du MoDem, qui succède au LR Michel Barnier, victime d'une motion de censure trois mois après son arrivée.
Une dégradation déplorée par le patron des députés LR Laurent Wauquiez qui l'a présentée sur X comme "la facture de la censure" de Michel Barnier, fustigeant "l’impéritie du couple Le Pen-Mélenchon".
Lors de la traditionnelle passation vendredi, François Bayrou a d'emblée évoqué le sujet du déficit et de la dette, "une question qui pose un problème moral" et "pas un problème financier seulement".
Son premier défi sera de doter la France d'un budget pour l'an prochain, avec une Assemblée nationale toujours sans majorité.
Assurant ne rien ignorer "de l'Himalaya qui se dresse devant nous, des difficultés de toute nature", il a promis de "ne rien cacher, ne rien négliger et ne rien laisser de côté".
Rencontrée samedi à Pau, Elizabeth, 75 ans, a reconnu que la tâche de M. Bayrou serait "très difficile". "Mais je le sais assez courageux et batailleur", a-t-elle ajouté. Selon un sondage Elabe pour BFMTV publié samedi, 40% des Français jugent que la nomination de M. Bayrou est une mauvaise chose, 31% une bonne chose, 29% n’ayant pas d’avis.
Le Premier ministre, âgé de 73 ans, doit maintenant s'atteler à la composition de son gouvernement, qu'il veut compact et dominé par des personnalités d'expérience.
- "A priori de censure" -
Il doit s'accommoder d'une Assemblée qui peut le faire tomber si les voix de la gauche s'unissent à celles du Rassemblement national comme lors de la motion qui a mis fin au bail de Michel Barnier.
La plupart des partis politiques, y compris le RN, ont demandé à être reçus à Matignon, pour parler de la feuille de route du prochain exécutif.
Favorable à la proportionnelle, François Bayrou devra aborder cette question notamment avec le RN et les écologistes, partisans du changement de mode de scrutin.
Le Nouveau Front populaire, qui a d'ores et déjà annoncé qu'il ne participerait pas au gouvernement, se divise sur son attitude vis-à-vis du nouvel occupant de Matignon.
LFI déposera ainsi dès que possible une motion de censure, probablement après la déclaration de politique générale de M. Bayrou.
Pour sa part, la secrétaire nationale des Ecologistes, Marine Tondelier a affirmé samedi sur France Inter qu'elle ne souhaitait pas "censurer a priori" le gouvernement de François Bayrou, mais qu'elle commençait déjà "à avoir des a priori de censure".
A droite, Les Républicains ont conditionné leur participation au gouvernement au "projet" que leur présentera le nouveau Premier ministre.
"Nous ne nous renierons pas", a prévenu l'eurodéputé LR François-Xavier Bellamy sur France Inter, citant comme priorités de son parti l'immigration, la sécurité, l'agriculture, la fiscalité ou encore la dette du pays.
Vendredi soir à Matignon, François Bayrou a d'ailleurs reçu le ministre LR de l'Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau, pour évoquer "la sécurité", dont celle du pape en Corse dimanche, ou encore la situation à Mayotte, balayé par un cyclone samedi matin. Sur X, M. Bayrou a affirmé se tenir informé de la situation "heure par heure", assuré de la mobilisation de l'Etat et invité les Mahorais à la prudence.
M. Retailleau, qui cristallise l'agacement à gauche, a préparé ces derniers mois un projet de loi contre le narcotrafic et un autre sur l'immigration qu'il prévoyait de présenter au Parlement en début d'année prochaine. Deux projets de loi qu'il pourrait reprendre s'il est reconduit à Beauvau.
Le gouvernement de M. Bayrou devra aussi décider s'il reprend à son compte le texte sur la fin de vie, dont l'examen était prévu début février à l'Assemblée. Le sujet est porté de longue date par le député du groupe MoDem Olivier Falorni.
(P.Hansen--DTZ)