Malgré les JO, des breakeurs veulent rester des "artistes"
Devenir une discipline des Jeux olympiques est une occasion rêvée pour être plus visible et plus respecté. Mais à moins de deux ans de Paris 2024, des breakeurs ne veulent pas que le côté artistique soit oublié.
Dans la salle des Folies Bergère à Paris, s'est tenue cette semaine une soirée unique de "Flying Bach", un spectacle qui triomphe depuis 12 ans dans le monde entier et qui atterrissait pour la première fois en France.
Depuis son lancement par la compagnie berlinoise "Flying Steps" en 2010, le show, qui marie une chorégraphie de breaking à une musique de Bach, a été vu par plus d'un demi-million de spectateurs dans des dizaines de pays.
Avec les débuts du breaking aux JO en 2024, un débat qui dure depuis la naissance de cette danse dans les ghettos du Bronx, dans les années 1970, refait surface.
"Les gens nous disaient tout le temps, +ce que vous faites, c'est du sport, ce n'est pas de la danse", affirme à l'AFP Vartan Bassil, fondateur et directeur artistique de "Flying Steps" mais aussi de l'académie du même nom qui accueille aujourd'hui 1.000 élèves.
Avec les JO, "tout le monde parle de nouveau des breakeurs comme athlètes (...) mais il ne faut pas oublier que ce sont des danseurs", ajoute-t-il, précisant le spectacle avait justement été conçue "pour montrer que c'est une forme d'art".
Sur scène, pendant les répétitions, ils enchaînent des tableaux, certains avec une danseuse sur pointes, rythmant leurs "headspin" (rotation sur la tête), "handstand" (appui renversé sur un bras) et autres mouvements avec les préludes et des fugues de Bach.
L'histoire tourne autour de la rivalité entre sept breakeurs, emmenés par un entraîneur exigeant et perturbés par l'arrivée d'une ballerine.
"Avec ce show, on a eu l'occasion de montrer l'art du break à différents publics et pas seulement au monde du hip-hop", affirme le "Bboy" (danseur de break) Benny Kimoto, qui a, avec son "crew" de "Flying Steps", été quatre fois champion du monde et dans le passé détenteur d'un record Guinness pour le "headspin".
- Athlète et artiste -
Il ne partage pas l'appréhension qu'a pu, ou que peut encore éprouver le milieu du hip-hop à l'égard de l'entrée du breaking aux JO.
"Je pense que c'est une bonne chose parce que davantage de gens auront la chance de voir du breaking et vont le traiter avec le respect qu'il mérite et pour lequel on se bat depuis années", dit-il.
Il se sent lui-même à la fois athlète et artiste. "Ce qu'on fait est à la limite des possibilités physiques, mais nous sommes également des danseurs sur scène qui racontent des histoires", précise le breakeur.
Certains danseurs de la troupe qui ne participent pas au spectacle se consacrent actuellement à l'entraînement pour les JO et le chorégraphe du show, Michael Rosemann, dit Mikel, a été sélectionné pour devenir l'entraîneur de l'équipe berlinoise. Celle-ci qui va participer à des compétitions avec d'autres villes allemandes, afin de former à terme l'équipe nationale.
"Aller au JO et représenter son pays, c'est le top!" dit-il.
Selon lui, le breaking comme art et comme sport peuvent coexister, soulignant que cette danse était très ouverte et "peut se mélanger avec d'autres formes d'art".
"En Allemagne, au tout début, on nous disait qu'on ne pouvait pas danser sur la musique de Bach car elle était intouchable...et certains disent que les JO, c'est une trahison... mais il faut toujours faire le premier pas pour convaincre les gens", assure Mikel.
(M.Dylatov--DTZ)